Jean-Charles Naouri

Magasins de proximité, e-commerce et innovation, analyse de l’entretien de Jean-Charles Naouri au Figaro

Analyse de l’impact de la crise sanitaire, situation du groupe Casino, performances des différents segments et avenir de la distribution alimentaire : Actu-Retail décrypte les différentes annonces du PDG du groupe Casino dans un entretien exclusif donné hier au Figaro.

Les interviews de Jean-Charles Naouri, PDG du groupe Casino sont des plus rares et, lorsque cette rareté de la parole est mise entre parenthèses le temps d’un entretien, cela constitue toujours un évènement pour le secteur de la grande distribution. Nous en parlions le 11 mai dernier : Jean-Charles Naouri s’était déjà exprimé auprès des collaborateurs du groupe via une lettre. Quinze jours après cette prise de parole, Jean-Charles Naouri s’adresse cette fois-ci à l’externe, et a choisi pour ce faire les colonnes du Figaro.

Pour le premier actionnaire du groupe Casino, la crise sanitaire a eu un effet d’accélérateur sur des tendances déjà prononcées : le déclin du modèle des grands hypermarchés, “irrémédiable” selon Jean-Charles Naouri, ainsi que celui des centres commerciaux de destination. Sur ce dernier point, il n’est qu’à voir la performance des foncières, d’URW à Klépierre en passant par Gecina, au cours de ces derniers mois pour se convaincre des limites inhérentes au modèle. La question des centres commerciaux de destination soulevée par le président du groupe Casino n’est d’ailleurs pas anodine, et contraste, à maints égards, avec l’attrait sans cesse croissant des Français à l’égard du e-commerce alimentaire et non-alimentaire.

Jadis valeurs refuges, les foncières ont grandement pâti de la crise sanitaire et du confinement, tant en matière de mobilité des usagers habituels que d’ouvertures des commerces. D’où les analyses pour le moins pessimistes de Jean-Charles Naouri quant à la capacité de ces formats à tirer parti de la nouvelle donne induite par la crise sanitaire et son lots de mutations, tant en matière de comportements d’achats que d’évolution des mentalités.

Un cours de l'action Carrefour à son plus bas

Quant au déclin des hypermarchés, et notamment sur le segment des surfaces les plus grandes, leur avenir s’est considérablement assombri ces derniers mois, comme le montrait d’ailleurs une étude de Nielsen portant sur l’évolution du chiffre d’affaires PGC+FLS par format. Il n’est qu’à regarder l’évolution du cours de l’action Carrefour sur les dernières années, avec un cours à l’étiage depuis plusieurs semaines, pour se convaincre du fait que la pandémie de Covid-19, tant auprès des clients que des investisseurs, a accéléré des évolutions déjà en germes.

“L’avenir de la distribution alimentaire, c’est d’être au plus près des clients” (Jean-Charles Naouri)

A l’opposé de ces formats perçus comme étant sur le déclin, le PDG du groupe Casino estime que les excellentes performances réalisées par les petits formats de proximité, les magasins premium, ainsi que le e-commerce, n’ont aucunement vocation à se limiter au seul confinement. Pour Jean-Charles Naouri, cette surperformance a vocation à durer, comme en témoigne le fait que “l’activité de Cdiscount reste proche de celle atteinte pendant le confinement”. En ce qui concerne l’alimentaire, si les ventes en ligne ont triplé pendant le confinement, ces dernières ont, également, doublé depuis le 11 mai et le début du déconfinement. Signe d’une tendance loin d’être un épiphénomène, et d’un attrait sans cesse croissant des Français pour le e-commerce.

Les ventes en ligne dans l'alimentaire ont été multipliées par 3 pendant le confinement

Dans ce contexte, Jean-Charles Naouri mise sur une segmentation et une diversification accrue du secteur de la distribution alimentaire qui n’est plus, selon lui, le “le marché “moyennisant” d’il y a dix ans”. Cette segmentation va être accélérée par les évolutions des comportements d’achats et devrait donc déboucher sur un secteur à plusieurs vitesses et plusieurs dynamiques. D’un côté des clients qui, en quête perpétuelle de prix bas, continueront à se tourner vers les discounters et certains hypermarchés, et de l’autre, une clientèle faisant du service, de la livraison et de la présence dans l’offre de produits locaux et bio des marqueurs déterminants. Cette dernière catégorie constitue le coeur de la clientèle du groupe Casino, selon Jean-Charles Naouri, en direction de laquelle différentes innovations, offres et services sont et seront élaborés. L’annonce de la création d’ici à un an de 300 nouveaux magasins de proximité de la part du groupe Casino s’inscrit dans une volonté de préempter encore plus ces formats porteurs en croissance.

L’innovation technologique clé de l’avenir de la distribution ?

Déploiement des magasins autonomes, avec 300 magasins sur toute la France pouvant accueillir des clients en horaires étendus, accélération dans la data relevanC, partenariat avec Amazon Prime et alliance avec Ocado : Jean-Charles Naouri souligne également la place de l’innovation dans la stratégie du groupe Casino en soulignant que ces innovations ont vocation à répondre aux comportements des clients, profondément remodelés au cours des deux dernières décennies.

35% des paiements en supermarché se font sur applis ou caisses automatiques

Alors que la livraison à domicile a, selon Jean-Charles Naouri, vocation à venir fortement concurrencer le drive, qui était jusque-là “le modèle historique en France”, le PDG du groupe Casino a détaillé les différentes innovations déployées afin de répondre à cet enjeu et de “servir le client où il est avec un service irréprochable”. Si 100 000 clients sont déjà livrés quotidiennement par les différentes enseignes du groupe Casino, et notamment par le biais du service Amazon Prime, la mise en service à la mi-mars de l’entrepôt automatisé déployé par Ocado en Île-de-France, devrait permettre de répondre avec d’autant plus de moyens à une demande sans croissante. Et sur ce dernier point, Jean-Charles Naouri donne à penser que les entrepôts de ce type n’ont pas vocation à se cantonner à la seule Île-de-France mais ont, au contraire, vocation à se diffuser sur le territoire.

Keep Exploring
caisse du supermarché
Les prix dans la grande distribution ont diminué en juin sur fond de concurrence entre enseignes