Champ de blé

Loi Egalim : vers une modification par le Sénat ?

En 2018, pour répondre aux questions de durabilité, de sûreté et de rémunération liées à l’alimentation et à la consommation de produits alimentaires, les États généraux de l’alimentation débouchent sur la loi Egalim. Cette loi englobait de nouvelles manières de considérer l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et visait un mode d’alimentation sain et durable. Aujourd’hui, le Sénat estime qu’il est nécessaire de modifier le texte et souhaite prolonger de 14 mois deux mesures phares : l’encadrement des promotions et la hausse du seuil de revente à perte.

Seuil de revente à perte et plafonnement des promotions

Promulguée le 30 Octobre 2018, la loi dit “Egalim” a pour but d’équilibrer les relations commerciales dans les secteurs agricoles mais aussi, de permettre une alimentation plus saine. Cette loi s’articule autour de trois objectifs précis : payer le juste prix aux producteurs, renforcer la qualité sanitaire, environnementale et nutritionnelle des produits et favoriser une alimentation sûre pour tous. Parmi les mesures intégrées au texte, on peut notamment citer celles qui se trouvent au coeur de l’actualité aujourd’hui : le seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions. Ces mesures devaient être testées durant deux ans et un rapport d’évaluation était attendu pour octobre.

Instauré en 1996, le seuil de revente à la perte interdit de vendre tout produit en dessous du prix auquel il a été acheté au fournisseur. Relever ce seuil constitue ainsi un levier favorable, pour stopper la destruction de valeur, relancer la création de valeur et en assurer une équitable répartition entre les divers maillons de la chaîne alimentaire. La loi “Egalim” a donc mis en place un relèvement de 10 % de ce seuil dans le but de mécaniquement remonter de 10 % le prix de centaines de produits du quotidien et d’assurer une rémunération suffisante du producteur.

La loi s’est aussi penchée sur les abus dans les promotions réalisées par certains acteurs du commerce. Considérées comme des vecteurs d’augmentation du gaspillage et provoquant une perte de repère chez les consommateurs vis-à-vis du juste prix des produits agricoles, la loi Egalim prévoit un encadrement en valeur et en volume des avantages promotionnels”, immédiats ou différés. Le terme “gratuit” devient donc totalement interdit, les promotions du type « 1 acheté = 1 offert » disparaissent totalement et la DGCCRF s’assure de l’encadrement de ces nouvelles lignes directrices.

Des changements souhaités par le Sénat

La crise sanitaire a entraîné son lot de transformations dans notre économie. Durant les trois derniers mois, les habitudes de consommation ont été bousculées et les manières de penser la distribution de produits alimentaires a profondément changé. Dans cette lignée, le 7 mai, le gouvernement a déposé un projet de loi, en procédure accélérée, lui donnant la possibilité de régler par ordonnances de multiples questions survenues avec la pandémie de covid-19. Dans ce projet se trouvent le prolongement pour près de 30 mois des deux mesures de la loi “Egalim” relatives au relèvement du seuil de revente à perte et à l’encadrement des promotions.

Cette prolongation a cependant connu de nombreux bouleversements. Comme l’indique Benoit Merlaud, journaliste pour le média spécialisé Linéaires : “rallonger de plus de deux ans, sans évaluation préalable, une expérimentation qui a déjà suscité de nombreuses critiques paraissait pour le moins précipité”. Dans cette lignée, l’Assemblée et le Sénat se sont l’un après l’autre positionnés sur ce délai de rallongement. L’Assemblée nationale, en première lecture, a raccourci le délai à 18 mois. Dans un amendement adopté le 18 mai, le Sénat quant à lui proposait “de prolonger de 14 mois cette expérimentation”, une période donc sensiblement plus courte que celle suggérée par le gouvernement.

En plus de cette modification de la période de prolongement, la Commission des Affaires Economiques du Sénat s’est aussi positionnée sur l’adoption d’un amendement transpartisan qui vise dès à présent à corriger un effet critiquable de la loi “Egalim”. Le Sénat “vise à introduire un correctif attendu des professionnels” en donnant la possibilité, pour certains produits saisonniers, de déroger uniquement à l’encadrement des avantages promotionnels en volume à 25% des ventes. L’idée de ce changement est de venir en aide aux filières agricoles françaises dont les produits s’écoulent sur une période courte et traditionnellement très animée par les promotions. Nul doute que les prochaines discussions sur le sujet permettront de rouvrir les débats occasionnés lors du vote de la loi il y a près de deux ans à la lumière de la crise que nous venons de vivre.

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