Le paysage de la grande distribution italienne connaît un bouleversement majeur avec la sortie d’un acteur historique et l’arrivée d’un nouveau propriétaire aux ambitions singulières.
Cette opération pourrait redéfinir les équilibres du secteur et ouvrir la voie à un modèle atypique en Europe. Entre promesses de transformation et défis à relever, l’avenir de la distribution alimentaire en Italie s’annonce plus incertain que jamais.
Carrefour Italie : raisons d’un retrait et opportunité pour NewPrinces
Carrefour a officialisé la vente de sa filiale italienne à NewPrinces, un industriel du secteur agroalimentaire, pour 240 millions d’euros. En 2024, la filiale affichait 4,2 milliards d’euros de chiffre d’affaires, mais subissait 67 millions de pertes opérationnelles et avait réduit ses effectifs à un peu plus de 10 000 salariés. Incapable de s’imposer dans un marché fragmenté et dominé par des enseignes régionales, Carrefour a préféré se désengager.
Pour NewPrinces, né en 2024 de la fusion entre l’italien Newlat Food et le britannique Princes, ce rachat est stratégique. Avec 2,8 milliards d’euros de chiffre d’affaires réalisés principalement via les MDD, le groupe dirigé par Angelo Mastrolia veut bâtir une intégration verticale inédite, combinant production et distribution. Inspiré du modèle suisse Migros, il ambitionne de repositionner l’offre italienne vers des produits de meilleure qualité et à plus forte valeur ajoutée.
Un modèle hybride entre opportunités et incertitudes
Ce pari audacieux un industriel qui prend le contrôle d’un distributeur d’envergure reste rare en Europe. L’objectif est de créer une « supply chain company » où la frontière entre producteur et distributeur disparaît. Mais cette stratégie hybride suscite des doutes risque de conflits d’intérêts avec les autres enseignes, difficulté à écouler ses produits auprès de rivaux et incertitudes sur la rentabilité d’une telle intégration. Les analystes s’interrogent sur la capacité de NewPrinces à concilier exigences industrielles et logiques commerciales dans un secteur historiquement difficile à rentabiliser.
Des défis opérationnels et financiers considérables
La reprise de Carrefour Italie représente un chantier colossal transformer un réseau de 1 188 magasins, dont plus de 80 % en franchise, nécessitera au moins 200 millions d’euros d’investissements, un montant jugé insuffisant par plusieurs experts. La fidélisation des franchisés, notamment des partenaires régionaux comme Etruria Retail, reste incertaine après 2026.
Sur le plan financier, NewPrinces affiche en 2024 un chiffre d’affaires stable à 2,8 milliards d’euros, un résultat net en hausse à 142,3 millions et une dette nette réduite à 346 millions. Mais l’incursion dans la distribution accroît les risques, dans un secteur où même des géants comme Carrefour peinent à générer des profits durables.
