Shein, Temu : leur visibilité en ligne bientôt compromise en Europe ?

Shein, Temu : leur visibilité en ligne bientôt compromise en Europe ?

Shein et Temu, deux géants de la vente en ligne, suscitent de vives discussions en Europe. Leur modèle économique, axé sur des prix ultra-compétitifs et une production rapide, attire autant qu’il inquiète. Les régulateurs européens s’interrogent sur les pratiques commerciales de ces plateformes, notamment en matière de protection des données et de respect des normes environnementales.

Alors que la pression monte, une question cruciale émerge, ces mastodontes du e-commerce pourraient-ils être bannis des moteurs de recherche en Europe ? L’impact potentiel d’une telle décision serait considérable, tant pour les consommateurs que pour le paysage numérique européen.

Demande de pouvoir de déférencement européen

Véronique Louwagie, ministre du Commerce, a récemment sollicité le commissaire européen Michael McGrath pour instaurer un pouvoir de déférencement direct au niveau européen, ciblant particulièrement les plateformes chinoises Shein et Temu. Cette démarche, révélée par Le Figaro, vise à pallier l’inefficacité des sanctions actuelles contre ces sites, jugés non conformes aux normes européennes.

Bien que la France dispose déjà d’un mécanisme national de déférencement, Louwagie estime qu’une action coordonnée à l’échelle européenne est nécessaire pour renforcer la régulation. Cette initiative s’inscrit dans un contexte où le Digital Services Act offre déjà des outils de sanction, mais dont l’application reste lente et complexe.

Un Pouvoir déjà disponible au niveau national

La France, bien qu’elle ait déjà utilisé son mécanisme national de déférencement contre Wish en 2020, n’a pas encore appliqué cette mesure à Shein et Temu. Selon Luc-Marie Augagneur, avocat au cabinet Cornet Vincent Segurel, la situation est plus complexe avec ces plateformes, car elles collaborent avec les autorités françaises et dépendent moins des moteurs de recherche grâce à leurs applications mobiles.

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Les risques de contournement rendent une telle action potentiellement inefficace. Cette complexité souligne la nécessité d’une approche européenne coordonnée, malgré l’arsenal de sanctions déjà disponible via le Digital Services Act, qui reste difficile à mettre en œuvre rapidement.

Les outils du Digital Services Act

Le Digital Services Act (DSA) offre un cadre de sanctions robustes pour les infractions des plateformes en ligne, incluant des astreintes pouvant atteindre 6 % du chiffre d’affaires journalier mondial. En avril et mai 2024, l’Union européenne a classé Shein et Temu comme des plateformes en ligne très larges (VLOP), les obligeant à se conformer à des règles strictes.

Cependant, malgré l’ouverture d’une procédure formelle contre Temu le 31 octobre 2024, les résultats tardent. La lenteur des procédures est illustrée par l’amende de 40 millions d’euros infligée à Shein en juillet 2025, trois ans après le début de l’enquête. Cette situation renforce l’urgence d’une action européenne plus rapide et efficace.

Arthur Quentin

Journaliste spécialisé dans la grande distribution et le commerce en ligne. Fort d’une expérience au sein de plusieurs rédactions, il décrypte les tendances de consommation, les stratégies des enseignes et les meilleurs bons plans pour Actu Retail.